• Communiqué de presse

Reconstruction faciale : une enquête pluridisciplinaire menée à Sorbonne Université redonne un visage à un soldat napoléonien

Un projet de recherche associant la Bibliothèque et l’Institut des sciences du calcul et des données de Sorbonne Université a permis de reconstituer le visage d’un soldat de Napoléon. Véritable enquête, ce projet qui a pour point de départ un crâne conservé dans les collections d’anatomie pathologique Dupuytren, propose une approche pluridisciplinaire et des techniques scientifiques innovantes croisant numérisation 3D par photogrammétrie avec des recherches historiques et archivistiques. Cette collaboration, qui a également permis de révéler l’identité du soldat, s’inscrit dans une démarche éthique de « désanonymisation » des individus et des trajectoires personnelles.

 

  • Marion Valzy, service de presse de Sorbonne Université
  • 01 44 27 37 13 - 06 14 02 20 51
  • Claire de Thoisy-Méchin, service de presse de Sorbonne Université
  • 01 44 27 23 34 - 06 74 03 40 19
  • Rémi Gaillard, responsable du pôle Collections scientifiques et patrimoine
  • 01 44 27 51 94
  • Eloïse Quétel, responsable des collections médicales et du patrimoine artistique
  • 01 44 27 91 91

Aujourd’hui conservées à Sorbonne Université, les collections d’anatomie pathologique Dupuytren rassemblent plusieurs milliers de pièces osseuses, de spécimens en fluide et de cires anatomiques. Parmi elles, le crâne d’un soldat napoléonien qui mourut en mars 1806, quelques jours après avoir eu le front accidentellement transpercé par une baguette de fusil ; ce crâne est officiellement nommé Christophe Cros, d’après la tradition écrite. Le caractère spectaculaire de la blessure, tout comme le fait que la baguette n’a miraculeusement touché aucune fonction vitale, ont contribué à rendre ce cas célèbre. Il fut étudié par Dominique-Jean Larrey, pionnier de la « chirurgie de bataille » et qui, comme chirurgien en chef de la Grande Armée sous l’Empire, sera présent sur la plupart des champs de bataille des campagnes militaires de Napoléon 1er.

 


« Ce crâne est une pièce emblématique des collections d’anatomie pathologique de l’ancien musée Dupuytren et a acquis une certaine célébrité dans l’histoire de la médecine et des neurosciences », explique Éloïse Quetel, conservatrice-restauratrice de restes humains et matériaux organiques, responsable des collections médicales et de la collection Dupuytren à Sorbonne Université.


 

Un projet pluridisciplinaire associant la Bibliothèque de Sorbonne Université, qui assure la conservation des collections scientifiques de l’université, et l’Institut des sciences du calcul et des données (ISCD), a été lancé en 2022 afin de reconstruire le visage de ce soldat et retrouver son identité.

À partir d’une numérisation du crâne en 3D par photogrammétrie et en s’appuyant sur une méthode scientifique innovante, des ingénieures et ingénieurs en visualisation scientifique de l’ISCD ont proposé une reconstruction rigoureuse du visage sous forme de maillage numérique 3D. Le logiciel Mesh to Metahuman a ensuite permis d’affiner la représentation du visage en profitant de nouvelles fonctionnalités de rendu photo-réaliste.

À gauche : le crâne de Christophe Cros, conservé au sein des collections d’anatomie pathologique Dupuytren ; à droite, la reconstitution de son visage obtenue par l’ISCD © Sorbonne Université

En parallèle, les recherches historiques et archivistiques menées par les équipes du pôle Collections scientifiques et patrimoine de la Bibliothèque de Sorbonne Université ont permis d’avancer l’hypothèse que le crâne pouvait être celui de Stapham Grosse, un jeune charpentier alsacien originaire d’Hartmannswiller (Haut-Rhin), conscrit en novembre 1805 et âgé d’à peine 21 ans au moment de l’accident. La description physique présente sur sa fiche matricule, ainsi que des recherches iconographiques et des échanges avec des musées conservant des collections d’œuvres et d’objets d’art du Premier Empire, ont enfin permis d’approfondir le travail de caractérisation du visage et la physionomie type d’un soldat napoléonien.

Mobilisant l’expertise de différents profils (ingénieur, conservateur, historien, anthropologue, balisticien, etc.) et une méthode de reconstruction numérique innovante, le projet s’inscrit également dans une démarche éthique de « désanonymisation » des individus et des trajectoires personnelles représentés dans les collections d’anatomie pathologique de Sorbonne Université, composées de milliers de restes humains.

 


« Il s’agit d’un projet majeur car c’est l’application, à une pièce historique, de méthodes scientifiques pointues et contemporaines permettant de creuser la dimension science et histoire, aujourd’hui assez mobilisée dans les institutions muséales pour montrer l’apport de nouvelles technologies et méthodes scientifiques à des spécimens tels que celui-ci. J’y vois également une dimension mémorielle qui me tient à cœur dans la manière dont nous gérons les collections Dupuytren et les problématiques qu’elles soulèvent », conclut Rémi Gaillard, directeur adjoint de la Bibliothèque de Sorbonne Université, responsable du pôle Collections scientifiques et patrimoine.


 

Un documentaire et une table ronde

Un documentaire intitulé « Qui es-tu Christophe Cros ? » et réalisé par la direction de la Communication de Sorbonne Université, plonge les spectacteurs et spectatrices au cœur de cette enquête. Le film a été projeté le 22 novembre 2023 au cours d’un ciné-débat, animé par le journaliste Daniel Fiévet, en présence de six expertes et experts :
•    Rémi Gaillard, directeur adjoint de la Bibliothèque Sorbonne Université, responsable du pôle Collections scientifiques et patrimoine
•    Éloïse Quetel, conservatrice-restauratrice de restes humains et matériaux organiques, responsable des collections médicales et de la collection Dupuytren à Sorbonne Université
•    Chloé Bertolus, professeure à Sorbonne Université, cheffe de service de service de chirurgie maxillo-faciale à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière
•    Jacques-Olivier Boudon, professeur d’histoire contemporaine à Sorbonne Université, Centre de recherche en histoire du XIXe siècle  
•    Nicolas Leys, ingénieur en visualisation scientifique, Institut des sciences du calcul et des données de Sorbonne Université
•    Cyrille Le Forestier, archéoanthropologue, Institut national de recherches archéologiques préventives – Inrap