Tumeurs cérébrales : une nouvelle piste thérapeutique ?
Les glioblastomes sont les tumeurs cérébrales les plus fréquentes, dont le pronostic est souvent très défavorable. Une étude collaborative menée entre Jean-Léon Thomas, chercheur Inserm au sein de l’Institut du cerveau et de la moelle épinière (Inserm/CNRS/Sorbonne Université) et à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière AP-HP, et Akiko Iwasaki (département d’immunologie, école de médecine de Yale aux États-Unis), a montré un rôle bénéfique du réseau vasculaire lymphatique méningé dans le traitement de ces tumeurs, à court et à plus long terme. Les résultats sont publiés dans la revue scientifique Nature.
Les glioblastomes sont les tumeurs cérébrales les plus fréquentes, mais aussi les plus graves. Leur prévalence est estimée à 1/100 000, touchant principalement des patients âgés de 45 à 70 ans. Les traitements qui sont aujourd’hui proposés sont principalement chirurgicaux, associés à de la radiothérapie et de la chimiothérapie. Le bénéfice thérapeutique, en terme de survie, reste modeste (environ 18 mois actuellement), incitant les chercheurs à continuer d’explorer de nouvelles pistes de traitements potentiels.
Éric Song (Université de Yale), premier auteur de ces travaux, Jean-Léon Thomas (Inserm/CNRS/Sorbonne Université), Akiko Iwasaki et leurs collègues se sont penchés sur le réseau lymphatique méningé pour savoir si celui-ci régulait le système immunitaire en réponse à la présence d’une tumeur cérébrale. Véritable tuyauterie de vaisseaux lymphatiques parcourant les méninges autour du cerveau, le réseau lymphatique méningé suscite un intérêt particulier depuis des études publiées au cours des cinq dernières années montrant sa connexion aux ganglions lymphatiques du cou (qui sont le lieu de prolifération et de différenciation des cellules immunitaires), ainsi que sa fonction de drainage des cellules immunitaires vers ces derniers.
Dans la nouvelle étude publiée dans Nature, les chercheurs ont travaillé avec des modèles animaux de glioblastome. Ils ont montré que la tumeur disparaissait lorsque les lymphatiques méningés étaient préalablement élargis par injection dans les méninges d’un facteur de croissance lymphatique appelé VEGF-C. La croissance du réseau lymphatique méningé induite par VEGF-C (observable sur la photo 2) a été corrélée à une entrée massive de cellules immunitaires lymphocytaires T (CD4 et CD8), absentes dans des conditions normales, dans l’environnement de la tumeur.
Cette réponse à court terme détruit la tumeur et s’accompagne d’une persistance de cellules immunitaires ‘mémoires’ spécifiquement dirigées contre les cellules tumorales, permettant le rejet de la même tumeur à plus long terme.
Néanmoins, les expériences des chercheurs montrent que c’est en combinaison avec une immunothérapie déjà utilisée en neuro-oncologie que le traitement transitoire avec VEGF-C est le plus efficace, permettant d’éradiquer complètement le glioblastome existant. « Notre étude souligne que le fait de renforcer le réseau des vaisseaux lymphatiques méningés permet d’augmenter le trafic des antigènes tumoraux depuis les méninges vers les ganglions lymphatiques », explique Jean-Léon Thomas.
Avec ses collègues, il conclut que le rôle majeur du réseau lymphatique méningé serait de transporter depuis les méninges le message d’alerte immunitaire déclenchant l’activation des lymphocytes dirigés contre la tumeur.
Les résultats de l’étude ouvrent de nouvelles perspectives dans le traitement des tumeurs cérébrales en ciblant les vaisseaux lymphatiques méningés et leurs ganglions associés.
Les chercheurs souhaitent poursuivre ces travaux en étudiant le rôle du réseau lymphatique méningé dans le cadre d’autres pathologies. « Nous sommes en train d’explorer les mécanismes de fonctionnement et le potentiel thérapeutique de ce réseau vasculaire avec de nouveaux modèles expérimentaux, et pour d’autres maladies du système nerveux, neurodégénératives, neuro-vasculaires, et infectieuses », conclut Jean-Léon Thomas.
Tumeurs cérébrales : le réseau lymphatique méningé ouvrirait une nouvelle piste thérapeutique.
(Source : salle de presse Inserm).