• Communiqué de presse

Comment battre de nouveaux records au 200 mètres ?

Le record du monde d’Usain Bolt sur 200 mètres n'a pas été battu depuis 10 ans, et celui de Florence Griffith Joyner depuis plus de 30 ans. Et si les mathématiques venaient au secours du sport pour comprendre comment dépasser ces records ?

Grâce à un modèle mathématique, Amandine Aftalion, chercheuse du CNRS au Centre d'analyse et de mathématique sociales (CNRS/EHESS), et Emmanuel Trélat, chercheur de Sorbonne Université au Laboratoire Jacques-Louis Lions (CNRS/Sorbonne Université/ Université de Paris) ont démontré que la forme des pistes d'athlétisme pourrait être optimisée afin d’atteindre de nouveaux records. A prévoir : des lignes droites plus courtes et des rayons plus grands. Ces travaux sont publiés dans Royal Society Open Science le 25 mars 2020.

Actuellement, il existe trois types de pistes certifiées par les fédérations d’athlétisme : la piste standard, constituée de deux lignes droites de 84,3 mètres et de deux demi-cercles de 36,5 mètres de rayon, et deux types de pistes à anses de panier. Il est communément admis dans la communauté sportive que la piste standard permet les meilleures performances et qu’il est quasiment impossible de battre un record sur une piste à anses de panier. Conçue pour inclure un stade de football ou de rugby, ce type de piste possède des virages avec une courbure plus grande, la force centrifuge y est donc plus importante, notamment dans les lignes intérieures. Les stades multisports ne sont donc pas adaptés pour établir de nouveaux records sportifs et ils représentent un net désavantage pour les coureurs dans certains couloirs. 

Le modèle mathématique développé par Amandine Aftalion et Emmanuel Trélat couple la mécanique et l'énergie du coureur, notamment sa consommation maximale d'oxygène (VO2 max) et son stock d'énergie anaérobie, en les faisant intervenir dans un système d'équations différentielles reliant la vitesse, l'accélération la force de propulsion, le contrôle moteur1 et la motivation du coureur, ce qui permet de déterminer, à travers les coûts et les bénéfices, la meilleure stratégie de course. 

Ce modèle permettant d’évaluer les performances des coureurs, il offre la possibilité de calculer la géométrie optimale d'une piste et de prédire l'évolution des performances en fonction de sa forme. Pour une piste standard, il a notamment permis de montrer que des lignes droites plus courtes (60 mètres au lieu de 84,3 mètres) et des rayons plus grands (44,3 mètres au lieu de 36,5 mètres) pourraient améliorer le record du 200 mètres de 4 centièmes de seconde. Et pour les pistes à anses de panier, qui doivent englober d'autres terrains de sports, ce modèle a mis en évidence qu’une nouvelle piste avec des lignes droites horizontales plus courtes et de petites lignes droites verticales pourraient améliorer les performances des coureurs. 

Les scientifiques, qui ont également présentés leurs travaux lors de la première journée d’étude du GDR Sport et activités physiques le 23 janvier 2020 à l’EHESS, sont en train d'adapter leur modèle à la course des chevaux grâce au soutien de l'Agence pour les mathématiques en interaction avec les entreprises et la société (CNRS/Université Grenoble-Alpes). 

Pour en savoir plus : 


Notes

1 Des changements trop brutaux ou trop importants sur la force de propulsion induisent un coût qui n'est pas énergétique mais moteur, le cerveau ayant besoin de coordonner les muscles pour créer le mouvement. C’est ce que représente le contrôle moteur.

Bibliographie

How to build a new athletic track to break records. Royal Society Open Science, Amandine Aftalion, Emmanuel Trélat, le 25 mars 2020.