Pierre Descombes

Les étoiles ne se cachent pas pour mourir. Lorsqu’un soleil sent sa fin proche, il expire dans un feu d’artifice illuminant l’espace d’un instant le cosmos glacé. Puis les cendres retombent, les reliques de l’astre s’effondrent pour ne laisser qu’un cadavre obscur et froid. Un corps si dense que rien, ni même la lumière, ne peut échapper à son irrésistible attraction gravitationnelle: un trou noir.

Nul astronaute ne pourra jamais revenir de ces tombeaux d’étoile, ou même prendre une photographie des mystères qui se trament derrière leur horizon. Toutefois, la physique quantique nous souffle que l’information ne peut jamais être effacée. Nous savons alors que, derrière ce voile d’ombre, l’histoire de tous les objets disparus dans le gouffre depuis sa formation est écrite dans un langage qui nous est encore inconnu.
 
D’après les théories d’Einstein, la masse gigantesque prisonnière du trou noir tord l’espace et le temps de manière prodigieuse, jusqu’à les faire ressembler à un gruyère truffé de chemins de traverses, à une écume grouillante de bulles éphémères. L’information que nous cherchons serait peut-être cachée dans la forme de cette écume.

Afin d’estimer si cet alphabet cosmique contient assez de lettres pour graver les annales de l’astre, je dois compter les manières d’entortiller l’espace-temps. Cela nous ramène à d’antiques énigmes qui hantaient déjà les géomètres grecs, et qui prennent, vingt-cinq siècles plus tard, une résonance nouvelle…