Wilson Savino : « La Fiocruz et Sorbonne Université vont bâtir ensemble un programme d'études en sciences de la santé »
Professeur et immunologue, Wilson Savino attache une importance toute particulière à la France et à Sorbonne Université. En effet, depuis plusieurs décennies, ce Brésilien travaille à développer des partenariats entre des organismes de santé français et son employeur, la Fondation Oswaldo Cruz (Fiocruz), une importante institution en sciences biomédicales. Récemment, la présidente de la Fiocruz, Nísia Trindade Lima, et Nathalie Drach-Temam ont d’ailleurs signé un tout nouvel accord de partenariat. Explications.
Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est la fondation Fiocruz ?
Wilson Savino : La Fondation Oswaldo Cruz est un établissement public rattaché au ministère de la Santé du Brésil. C’est une institution stratégique d’ampleur nationale qui comporte différentes unités de recherche à Rio de Janeiro et un peu partout sur le territoire. La fondation emploie plus de 10 000 personnes, fonctionnaires et contractuels confondus.
Certes, la Fiocruz est une institution de recherche dans les sciences biomédicales mais pas seulement! Elle propose aussi un volet formation en délivrant des diplômes de master et de doctorat liés à des projets de recherche, particulièrement en maladies infectieuses, dans un cadre de plus de 40 programmes de master et doctorat. Si historiquement ces maladies restent au cœur de nos projets de recherche et formation, nous nous orientons de plus en plus vers les maladies métaboliques du type diabète et obésité ou les maladies neurodégénératives.
La Fiocruz possède également deux hôpitaux à Rio dont un dédié aux maladies infectieuses. En 2020, elle a construit, en 70 jours, un hôpital de 200 lits pour les patients atteints de la COVID-19. Fort de nos expériences liées aux épidémies d’influenza ou de Zika au début des années 2000, nous avons développé un mécanisme de réponse rapide assez efficace, ce qui fait que nous étions à peu près parés pour cette pandémie.
Enfin, nous possédons deux unités de production: une pour les médicaments de synthèse, et une autre pour le développement des kits diagnostic et la production de vaccins. Nous produisons 60 à 70 % de tous les vaccins faits au Brésil.
En 2019, vous avez été nommé docteur honoris causa. Vous avez une relation spéciale avec Sorbonne Université…
W.S : En effet ! Et j’en ai aussi une avec la France. Je suis arrivé dans votre pays en 1981 pour un stage doctoral à l’hôpital Necker et dès lors, je travaille en partenariat avec des institutions de recherche françaises.
Mon histoire avec Sorbonne Université remonte, quant à elle, à une vingtaine d’années via l'Institut de myologie quand nous avons décidé l’un et l’autre de joindre nos efforts en immunologie et myologie. Avec cet institut de la faculté de Médecine, nous avons publié de nombreux articles et de nombreux étudiants et jeunes chercheurs ont pu faire des échanges universitaires entre nos deux pays.
Depuis juin dernier, je conseille la présidence de la Fiocruz sur la stratégie internationale et conduit des partenariats de recherche en santé avec des institutions dont fait partie Sorbonne Université. Voilà la raison de ma présence ici…
Pour tout vous dire, quand j’ai eu l’honoris causa, Jean Chambaz (ndlr: président de Sorbonne Université de 2017 à 2021) m’avait déjà invité à venir pour renforcer les liens entre Sorbonne Université et la Fiocruz, et cela a été maintenu avec Nathalie Drach-Temam. Je travaille désormais entre mon pays natal et la France, sur le campus de la faculté des Sciences.
Parlez-nous de l’accord de partenariat tout juste signé entre Sorbonne Université et la Fiocruz.
W.S : Les deux présidentes de nos institutions respectives ont signé un accord dans le but d’élargir la coopération déjà existante, ainsi que de bâtir conjointement un programme de master et de doctorat en sciences de la santé avec des volets distincts : biomédical, santé publique, sciences humaines. Tous, bien entendu, dans un cadre de recherche conjointe. Cette pluridisciplinarité donnera une vision plus large des sciences de la santé et permettra de créer de nouveaux types de collaborations avec pourquoi pas, la création de laboratoires de recherche internationaux. Nous allons bien sûr organiser des colloques pour donner de l’ampleur à ce genre de programme.
Dans le cadre de la stratégie d’internationalisation de la Fiocruz, la France est le premier pays à avoir été choisi en Europe - un partenariat avec le Mozambique, membre de la Communauté des pays de langue portugaise, existe déjà depuis 2008. Qui sait, pourrions-nous monter un bureau de la Fiocruz en France à Sorbonne Université ?!
Cela est certain, nous avons un passé solide et un avenir prometteur.