Restauration d’une œuvre d’art historique du campus Pierre et Marie Curie
Dans la perspective du lancement des travaux du bâtiment F, une toile monumentale de Jacques Despierre (1912-1995), commandée au peintre au cours de la première phase du chantier de construction de la Faculté des sciences, a été déposée afin d’être restaurée sous le pilotage du pôle Collections scientifiques et patrimoine de la Bibliothèque de Sorbonne Université.
Rythmes d'eau, Jacques Despierre - © Margaux Rabiller
Un laboratoire des arts
Le campus Pierre et Marie Curie entretient un lien historique étroit avec le dispositif du 1 % artistique, créé en mai 1951 afin qu’une partie des budgets alloués à la construction de bâtiments publics soit consacrée à des « travaux de décoration » par l’intermédiaire de commandes à des artistes contemporains. La construction d’une nouvelle Faculté des sciences, lancée au début des années 1950 sur le site de la Halle aux vins, a ainsi servi de laboratoire au 1 %, conduisant à la création de nombreuses œuvres d’art qui sont encore aujourd’hui visibles sur le campus.
Les premières œuvres du 1 % sont des peintures murales, commandées pour orner les « barres » élevées en 1958 par l’architecte Urbain Cassan. Elles sont réalisées par des artistes rompus aux arts décoratifs, ayant déjà reçu de nombreuses commandes publiques 1. C’est le cas du peintre Jacques Despierre (1912-1995), un des représentants de l’École de Paris, professeur puis chef de l’atelier mural à l’École nationale supérieure des arts décoratifs où il succède à Marcel Gromaire et enseigne le dessin, la fresque et la mosaïque. Dans les années 1950 et 1960, il réalise des panneaux décoratifs pour les paquebots de la Compagnie générale transatlantique et des Messageries Maritimes, notamment le France (1961). La même année, il se voit confier la réalisation d’une œuvre pour décorer le hall d’entrée du bâtiment F : ce sera Rythmes d’eau, une toile marouflée sur panneaux de bois de plus de 5 mètres sur 3 qui, comme les autres peintures murales commandées pour les barres Cassan aux peintres André Planson et Jacques Soubervie, traitent de thèmes faisant référence au monde scientifique 2.
Un patrimoine en restauration
C’est cette toile, conservée jusqu’en 2022 au sein du bâtiment F sur le campus Pierre et Marie Curie, qui est actuellement en cours de restauration. L’opération a été pilotée par le pôle Collections scientifiques et patrimoine de la Bibliothèque de Sorbonne Université qui, depuis sa création en 2017, est engagé dans la cartographie, la conservation et la valorisation des collections de l’université.
Déposée et transportée par des spécialistes de la conservation et de la restauration des œuvres peintes au sein des ateliers d’Aïnu, l’œuvre a fait l’objet d’une consolidation, d’un nettoyage de la couche picturale et d’un travail de retrait des repeints datant d’une précédente restauration, en 1975. Ces interventions ont permis la redécouverte des couleurs d’origine, vivaces et bien plus lumineuses.
Une résine ignifuge sera appliquée au revers et sur les flancs de l’œuvre à l’issue de la restauration afin de concilier la protection des panneaux de bois et les contraintes réglementaires. Elle devrait être réinstallée en avril 2023 dans le hall du bâtiment d’Esclangon où elle retrouvera sa vocation « décorative » et remettra en lumière l’histoire artistique, parfois méconnue, du campus Pierre et Marie Curie.
1 Christian Hottin, « L’Architecture universitaire des Trente glorieuses : des temples du savoir à l’université de masse », Universités et grandes écoles à Paris : les palais de la science, Paris, 1999, 222 p., p. 187-191.
2 Annette Roche, « Le 1 %, de la faculté des sciences de Paris à l’Université Pierre et Marie Curie : inventaire, restauration, valorisation d’un patrimoine artistique méconnu », In Situ, 17, 2011.
Les travaux en images
Image 1 : opération de dévernissage
Image 2 : opération de retrait des repeints
© Margaux Rabiller