"Il s'agit d'utiliser les forces et les ressources des deux universités pour servir une mission mondiale."
Sorbonne Université a récemment obtenu un financement pour la création d'un campus franco-indien dans l'Indo-Pacifique, avec l'Indian Institute of Technology Delhi (IITD) comme partenaire principal.
Alexandre Escargueil est professeur à Sorbonne Université, expert biomédical en biologie moléculaire et génétique, et pharmacologie et toxicologie. Il s’occupe également de représenter Sorbonne Université dans le cadre de l'accord franco-indien. Ce mois-ci, il se rendra en Inde avec une délégation de Sorbonne Université pour faire avancer cette collaboration.
Quelle est l'ambition première derrière la création de ce campus franco-indien ?
Il s'agit d'abord de répondre à une demande du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, et du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, d'augmenter le nombre d'étudiantes et étudiants en mobilité entre la France et l'Inde. En parallèle, nous avons voulu créer un campus virtuel, utilisant des espaces communs à chaque établissement, dans lequel nous mènerions des recherches communes. Enfin, nous voulions favoriser les échanges culturels.
Ce projet est par ailleurs essentiel pour la diplomatie scientifique, une valeur importante pour Sorbonne Université. Ce partenariat permettra aux Indiens qui ne viennent généralement pas en France ou en Europe d'en apprendre plus sur la science et l’enseignement. Ils pourront accéder à de nouveaux réseaux professionnels, collaborateurs et programmes académiques, et il en va de même pour les étudiants et professeurs français voyageant en Inde.
En quoi les forces de la France et de l'Inde se coordonnent-elles dans le domaine de la santé ?
En Inde, les services de santé se développent parallèlement à l'augmentation de la population de la classe moyenne, qui nécessite de nouveaux médicaments, un nouveau système de santé… Dans le même temps, en France, on se préoccupe beaucoup de la santé numérique et de la santé mondiale. On aborde les soins de santé sous plusieurs angles.
Avec nos partenaires indiens, nous ne travaillerons pas seulement dans les sciences de la vie, mais aussi dans le génie biomédical, l'électronique, l'intelligence artificielle, etc. En fin de compte, il s'agit d'utiliser les forces et les ressources des deux universités pour servir une mission mondiale.
Pourquoi la mobilité interculturelle est-elle importante dans ce cas particulier ?
La France et l'Inde n'ont pas d'histoire commune. En règle générale, les étudiantes et étudiants indiens font leur mobilité dans des pays anglophones et ne voient pas la France comme une option évidente pour les échanges universitaires. La France est bien connue pour la mode ou la gastronomie, par exemple, mais l’est moins pour sa culture scientifique.
Nous aimerions montrer que notre pays est une excellente option pour la formation et la recherche. Nous avons beaucoup d’atouts scientifiques. Nous souhaitons faire découvrir la culture française et européenne à la communauté étudiante indienne et à nos pairs dans ce pays.
En France, on ignore encore beaucoup de choses sur l'Inde. Nombreux sont les Françaises et Français qui ne connaissent pas l'étendue de la diversité en Inde - les régions, les gens, les climats… Nous avons encore beaucoup à apprendre. Nos étudiantes et étudiants en mobilité restent généralement en Europe ou se rendent aux États-Unis ou en Afrique pour leurs échanges universitaires. Nous voulons les encourager à découvrir les opportunités passionnantes qui les attendent en Inde.
Ce partenariat vise à développer un véritable écosystème de recherche et d'enseignement. Quels acteurs ou groupes cela inclura-t-il ?
À l’Indian Institute of Technology Delhi (IITD), de nombreux départements universitaires se joignent à notre partenariat. C’est notamment le cas des centres de génie biomédical, du département de génie biochimique et de biotechnologie, et de l'école d'intelligence artificielle.
Du côté de Sorbonne Université, nous serons accompagnés de représentants d'instituts et d'initiatives tels que l'Institut du cerveau et l'initiative de biologie, ainsi que des responsables de plusieurs masters, un responsable des partenariats, etc. Nous visiterons également le département des sciences sociales et humaines de l’IITD. Nous allons couvrir de nombreux domaines d'études, de nombreuses facultés, et réaffirmons cette idée de la santé globale.
Enfin, Connectome in science, une association réunissant des médecins, ingénieurs, chercheurs et étudiants de Sorbonne Université, se rendra aussi en Inde pour lancer dès le début de ce partenariat la mise en place d'activités sociales, d’accueil et d’accompagnement.
Quelle est votre implication dans le projet ?
Je suis chargé de rassembler tout et tout le monde. J'ai rédigé la proposition de partenariat en collaboration avec Christopher Cripps, conseiller pour les relations diplomatiques et la stratégie internationale à Sorbonne Université. Je m’occupe de présenter et de discuter du projet avec des collaborateurs potentiels, et je veille à ce que les différents instituts, initiatives et équipes de recherche soient représentés et s’accordent bien avec les visions des uns et des autres.
Je m’estime chanceux d'avoir été accueilli avec beaucoup d'enthousiasme, à la fois par mes collègues français et par mes nouveaux collègues à l'IITD en Inde.
Vous vous rendrez bientôt en Inde pour faire avancer ce partenariat. Qu’attendez-vous de ce voyage ?
Nous attendons la création de vrais programmes. Nous voulons inciter les laboratoires à candidater pour des bourses et être prêts à accueillir des étudiantes et étudiants indiens dès septembre 2023. Nous aimerions également envoyer quelques-uns de nos étudiantes et étudiants de niveau master en Inde, à peu près au même moment.