Aux frontières de la matière : quand la chimie devient un levier pour le monde de demain
L’Initiative Nouvelles Frontières de la Réactivité Moléculaire (iDream) portée par Marc Robert vise à explorer les potentiels encore inédits de la chimie à l’échelle moléculaire. En s’appuyant sur une approche résolument interdisciplinaire, elle fédère des expertises en chimie, biologie, physique et intelligence artificielle pour répondre aux grands enjeux contemporains dans les domaines de la santé, de l’énergie et de l’environnement. iDream entend ainsi stimuler l’innovation scientifique en créant des synergies nouvelles entre recherche fondamentale, technologies émergentes et enjeux sociétaux.
Interview avec Marc Robert, directeur de l’Initiative Nouvelles Frontières de la Réactivité Moléculaire (iDream)
Comment et dans quel contexte s’est constitué l’Initiative Nouvelles Frontières de la Réactivité Moléculaire ?
Marc Robert : Jusqu’à l’automne 2024, l’Initiative des Sciences et de l’Ingénierie Moléculaire (iSIM) fédérait les chimistes autour de projets centrés sur les travaux scientifiques à l’échelle moléculaire. iDream est né de la volonté de poursuivre et de renouveler cette dynamique, en intégrant des recherches aux interfaces pluridisciplinaires où la chimie joue un rôle central.
Les enjeux scientifiques fondamentaux portés par les approches moléculaires ont évolué ces dernières années, impactant fortement la manière dont les nouvelles technologies émergent pour répondre à des problématiques économiques, sociales et sociétales. La chimie joue un rôle clé dans ce contexte et cette dynamique.
L’interdisciplinarité est au cœur des initiatives et instituts. Comment se traduit-elle concrètement pour vous ?
M.R. : L’échelle moléculaire est essentielle pour appréhender la complexité de la matière. Nous explorons des systèmes complexes capables d’évoluer et d’interagir, en développant des structures artificielles aux propriétés qui vont au-delà de celles de leurs éléments pris individuellement. Ces travaux se situent le plus souvent à l’intersection de plusieurs disciplines, la chimie, la biologie, la physique mais aussi les sciences de la vie et de l’univers, et nécessitent donc une complémentarité forte des expertises.
Quels sont les objectifs de l’institut ?
M.R. : L’initiative iDream poursuit plusieurs objectifs :
- D’une part, renforcer l’impact de la recherche au sein de l’Alliance SU en fédérant les forces scientifiques autour de la réactivité moléculaire.
- D’autre part, créer une dynamique durable autour des thématiques de réactivité moléculaire, à la fois au sein de Sorbonne Université mais aussi en collaboration au niveau international.
- Enfin, en lien avec ce dernier aspect, iDream entend contribuer au développement de la recherche à l’échelle européenne, notamment dans le cadre du projet 4EU+.
Quels axes et enjeux de recherche avez-vous définis ?
M.R. : Nos recherches s’articulent autour de trois axes majeurs :
- Comprendre et contrôler la dynamique des systèmes réactifs, en étudiant leur évolution temporelle et les mécanismes sous-jacents.
- Concevoir et développer des systèmes moléculaires complexes, inspirés du vivant ou destinés à de nouvelles applications technologiques, notamment dans le domaine de la transition environnementale ou encore pour le traitement de l’information.
- Associer l’intelligence artificielle et la réactivité moléculaire, en utilisant l’IA pour modéliser les systèmes moléculaires et en concevoir de nouveaux, notamment dans le domaine de la catalyse et de la chimie pour la santé.
Quels sont les enjeux en termes de formation ?
M.R. : L’initiative iDream n’entend pas créer de nouvelle formation mais porte toutefois une réelle ambition en matière de formation. D’une part nous souhaitons promouvoir un apprentissage basé sur la recherche, en impliquant les étudiants dès le début de leur parcours. Un des enjeux de ce point de vue est de confronter les enjeux scientifiques aux problématiques sociales et sociétales, afin d’assurer une approche transversale des savoirs. D’autre part, nous souhaitons inscrire l’initiative dans le développement de l’Europe de la recherche et de la formation, en renforçant les échanges internationaux d’étudiants, en mobilité entrante et sortante.
Quel impact les recherches réalisées au sein de l’institut peuvent-elles avoir sur la société ?
M.R. : La chimie est au cœur de nombreux défis contemporains. Nos travaux entendent contribuer à des avancées majeures dans plusieurs domaines pour contribuer à des enjeux sociétaux, notamment pour la transition environnementale, avec le développement d’une chimie verte, la valorisation du CO2, le stockage de l’énergie solaire et la transition vers une économie bas carbone. Dans le domaine de la santé, il s’agit de catalyser une amélioration des connaissances sur les maladies, la conception de nouvelles approches thérapeutiques, mais aussi d’exploiter les principes de la chimie quantique pour des innovations de rupture. Plus largement, iDream se veut un moteur de progrès, en favorisant la synergie entre disciplines.